Cour d’appel de Paris : une marque automobile condamnée à agréer un réparateur qui remplit tous les critères requis par elle, à défaut de motifs sérieux justifiant un refus d’agrément.
par Cécile Staudt
24-11-2016

Cour d’appel de Paris : une marque automobile condamnée à agréer un réparateur qui remplit tous les critères requis par elle, à défaut de motifs sérieux justifiant un refus d’agrément.

Le 11 juin 2015, la Cour d’appel de Paris a rendu un arrêt dans une affaire opposant un garage, candidat réparateur agréé BMW et MINI, et la société BMW. Depuis plusieurs années, le candidat avait multiplié les démarches et procédures afin d’être agréé dans le réseau, ce que la société BMW refusait.

Suite à un audit réalisé auprès du candidat, la société BMW avait confirmé qu’il répondait bien aux standards BM et MINI mais avait refusé sa candidature en invoquant principalement le fait qu’il utilisait la dénomination « le spécialiste » qui, selon BMW, était susceptible de créer des désordres dans le réseau et était incompatible avec les termes du contrat de réparateur agréé. Sur ce point, la Cour d’appel considéra cependant que cette mention reflétait l’activité de la société et que ce terme, utilisé de manière courante, n’était pas de nature à prêter à confusion.

La société BMW invoquait encore d’autres griefs pour justifier son refus d’agrément du candidat, tels que la tenue de propos dénigrants, l’utilisation de manœuvres frauduleuses ou encore une campagne publicitaire annonçant la vente de véhicules « neufs ». Aucun de ces éléments ne fut cependant retenu par la Cour d’appel comme permettant de justifier le refus d’agrément du candidat. Concernant la campagne publicitaire, la Cour d’appel suivit l’argument invoqué par le garage selon lequel il commercialisait régulièrement des véhicules neufs en tant que mandataire.

En conclusion, la Cour d’appel jugea que le refus de la société BMW d’agréer le candidat ne reposait sur aucun motif sérieux. Elle condamna par conséquent la société BMW à agréer ce réparateur, sous peine d’une astreinte journalière.

Cette décision est très intéressante bien que peu motivée. Rappelons qu’en droit de la concurrence, les systèmes de distribution sélective qualitative ne peuvent en principe être admis qu’à certaines conditions. En particulier, les critères doivent être objectifs, justifiés et appliqués de manière non discriminatoire. L’appréciation est d’autant plus stricte pour les réparateurs agréés pour lesquels la Commission européenne estime que, compte tenu des parts de marché des parties, il est en principe interdit aux marques de fixer un nombre maximal de réparateurs agréés de telle sorte que tous les candidats qui remplissent les critères qualitatifs doivent être admis.

Dans la pratique, ces principes sont souvent confrontés à la liberté contractuelle et les condamnations sont relativement rares.

Cette décision est également intéressante en ce qui concerne la sanction prononcée : BMW doit agréer le garagiste. Une autre option pour la Cour d’appel aurait pu être, après avoir constaté le manquement de la société BMW, de condamner cette dernière au paiement de dommages et intérêts. La Cour a cependant opté en l’espèce pour une exécution en nature, le réparateur étant selon elle fondé à revendiquer la qualité de réparateur agréé.

Cécile Staudt